Publié le 11 mars 2024

Oubliez la recherche du « secteur parfait » ; le succès d’un nouvel arrivant au Canada réside dans la maîtrise des stratégies pour contourner l’exigence de l’expérience locale.

  • Chaque industrie possède sa propre « monnaie d’échange » (certifications, portfolio) qui peut supplanter une expérience de travail canadienne.
  • Votre profil en ligne, notamment sur LinkedIn, doit être une vitrine active qui attire les recruteurs, plutôt qu’un CV passif qui attend une réponse.

Recommandation : Cessez de postuler en masse et commencez à construire stratégiquement votre crédibilité et votre visibilité au sein d’un secteur cible avant même le premier contact avec un employeur.

Vous êtes qualifié, motivé, et votre permis de travail est en poche. Pourtant, une phrase revient sans cesse dans les réponses des recruteurs : « Désolé, nous recherchons un candidat avec une expérience canadienne ». C’est le mur auquel se heurtent des milliers de nouveaux arrivants talentueux. Cette barrière, souvent perçue comme un cercle vicieux — pas de travail sans expérience locale, pas d’expérience locale sans travail — est la source d’une immense frustration. On vous conseille alors de faire du bénévolat, de refaire votre CV au format local, ou de « réseauter », des conseils valables mais qui sonnent creux face à l’urgence de trouver un emploi qualifié.

La plupart des guides se contentent de lister les secteurs en demande comme les technologies de l’information (TI) ou la construction. Mais cette information est incomplète. La véritable question n’est pas tant *quels* secteurs recrutent, mais *comment* ces secteurs évaluent la compétence, et surtout, quelles sont les portes dérobées pour y entrer. En tant que chasseur de têtes spécialisé dans le placement de talents internationaux, je peux vous l’affirmer : la clé n’est pas dans votre CV, mais dans votre stratégie. Il faut cesser de penser comme un demandeur d’emploi et commencer à penser comme un consultant qui doit prouver sa valeur.

Mais si la solution n’était pas de chercher un secteur qui ignore l’expérience canadienne, mais plutôt de comprendre et d’acquérir la « monnaie d’échange » de crédibilité spécifique à chaque industrie ? Cet article va au-delà de la liste de secteurs. Nous allons décortiquer, pour chaque domaine, les stratégies concrètes pour transformer votre profil « étranger » en un atout irrésistible pour les recruteurs canadiens. Nous analyserons les tactiques pour être « chassé » plutôt que de postuler, les arbitrages financiers à faire, et les compétences transversales à maîtriser pour réussir dans ce marché unique.

Pour vous guider dans cette approche stratégique, cet article est structuré pour vous fournir des leviers d’action concrets. Découvrez comment transformer chaque obstacle en opportunité.

Pourquoi le secteur de la construction ralentit-il en hiver et comment s’y préparer ?

Le ralentissement hivernal dans la construction au Canada est une réalité dictée par la météo : le gel, la neige et les températures extrêmes rendent de nombreuses tâches extérieures impossibles ou dangereuses. Pour un nouvel arrivant, cette saisonnalité peut ressembler à une porte fermée. C’est en réalité une opportunité en or. Au lieu de subir cette période de creux, les candidats les plus stratégiques l’utilisent comme un tremplin pour le printemps. C’est le moment idéal pour acquérir la « monnaie d’échange » la plus précieuse du secteur : les certifications reconnues.

Plutôt que d’attendre que les chantiers redémarrent, l’hiver doit devenir votre saison de formation intensive. L’objectif est d’obtenir les certifications qui vous rendront immédiatement employable dès que la demande explose en avril. Pensez au certificat de la Commission de la construction du Québec (CCQ) ou aux qualifications spécialisées en chauffage, ventilation et climatisation (CVC). Ces papiers ont plus de valeur pour un employeur qu’une expérience étrangère difficile à vérifier. Cependant, il faut anticiper. Comme le démontrent les récents événements, même les programmes accélérés peuvent subir des retards. En effet, une enquête de Radio-Canada a révélé que près du quart des étudiants inscrits aux formations accélérées en construction début 2024 ont vu leur démarrage reporté, décalant leur diplomation en plein cœur de l’été.

Travailleur de la construction en formation hivernale dans un centre de formation canadien

Cette illustration d’un apprenti en formation pendant l’hiver incarne parfaitement cette stratégie : utiliser le temps froid pour maîtriser les outils à l’intérieur, dans des centres de formation professionnelle. Se préparer activement pendant que le marché est au ralenti est ce qui distingue un candidat qui subit le marché d’un talent qui l’anticipe. L’inscription précoce et la planification d’alternatives en cas de report sont donc des éléments cruciaux de votre stratégie.

Comment utiliser LinkedIn pour attirer les recruteurs canadiens sans postuler ?

Arrêtez de considérer LinkedIn comme un simple dépôt de CV en ligne. Pour un nouvel arrivant, c’est votre plus puissant outil de marketing personnel pour contourner la barrière de l’expérience locale. L’objectif n’est pas de postuler à des centaines d’offres, mais de transformer votre profil en un aimant qui attire les chasseurs de têtes. La nuance est fondamentale : vous ne cherchez pas un emploi, vous démontrez votre expertise pour que les opportunités viennent à vous. Une étude souligne que plus de 90 % des recruteurs en Amérique du Nord utilisent activement LinkedIn pour dénicher des talents, souvent avant même de publier une offre.

Pour être « chassé », votre profil doit émettre les bons signaux. Cela passe par une optimisation méticuleuse : un titre qui n’est pas juste votre poste actuel mais votre proposition de valeur (« Développeur spécialisé en FinTech » plutôt que « Développeur »), une section « Infos » qui raconte votre histoire et vos ambitions au Canada, et surtout, du contenu. Publiez des articles courts, commentez les publications d’experts de votre secteur au Canada, partagez des analyses pertinentes. Vous cessez d’être un profil anonyme pour devenir une voix active dans votre domaine. Cette stratégie change complètement la dynamique : vous n’êtes plus un demandeur, mais un expert potentiel.

Le passage d’une approche passive à une stratégie active sur LinkedIn est ce qui différencie les candidats qui attendent des candidats qui provoquent les opportunités. Le tableau suivant illustre l’impact concret de ce changement de mentalité.

Stratégies LinkedIn : Approche passive vs active pour attirer les recruteurs canadiens
Stratégie passive Stratégie active Impact mesurable
Activer #OpenToWork Publier du contenu sectoriel canadien +40% de visibilité profil
Optimiser mots-clés bilingues Commenter actualités canadiennes 3x plus de messages recruteurs
Localisation ‘Canada’ dans profil Rejoindre groupes professionnels canadiens +60% apparitions recherches
Créer profil en anglais ET français Demander entrevues informationnelles Réponse dans 72h en moyenne

Votre plan d’action : transformer votre profil LinkedIn en aimant à recruteurs

  1. Points de contact : Listez tous les mots-clés (français et anglais) qu’un recruteur canadien taperait pour trouver un profil comme le vôtre. Intégrez-les dans votre titre, résumé et expériences.
  2. Collecte : Inventoriez 5 entreprises canadiennes leaders dans votre secteur. Suivez-les et identifiez 2-3 employés clés (managers, directeurs) dans chacune.
  3. Cohérence : Votre photo est-elle professionnelle ? Votre bannière est-elle personnalisée et reflète-t-elle votre expertise ? Votre URL est-elle simple (linkedin.com/in/votrenom) ?
  4. Mémorabilité/émotion : Rédigez un post par semaine. Partagez un projet passé avec la méthode STAR (Situation, Tâche, Action, Résultat) ou commentez une actualité de votre industrie au Canada en apportant votre perspective.
  5. Plan d’intégration : Fixez-vous l’objectif d’envoyer une demande de connexion personnalisée par semaine pour une entrevue informationnelle, en ciblant les personnes identifiées à l’étape 2.

Salarié permanent ou consultant contractuel : quel statut offre le meilleur net après impôt ?

Face à un marché du travail compétitif, la voie du consultant ou travailleur autonome (contractuel) semble souvent séduisante pour les nouveaux arrivants. Le taux horaire affiché est généralement plus élevé, et cela peut donner l’impression de contourner les processus de recrutement traditionnels des postes permanents. Cependant, comparer le revenu brut d’un salarié à celui d’un consultant est une erreur de débutant. Pour faire un arbitrage financier éclairé, il faut regarder le net effectif après impôts et après avoir déduit tous les avantages sociaux que le statut de salarié inclut.

Un salarié permanent bénéficie d’un filet de sécurité non négligeable : assurances collectives (dentaire, médicaments, vie), congés payés, jours fériés, et souvent une contribution de l’employeur à un régime de retraite (REER). Le consultant, lui, doit financer tout cela de sa poche. Ses semaines de vacances sont des semaines sans revenu. Il doit également gérer sa propre comptabilité et payer les deux parts des cotisations sociales. L’incorporation peut offrir des avantages fiscaux, mais elle engendre aussi des frais administratifs. Le choix n’est donc pas seulement financier, il est aussi une question de tolérance au risque et de désir d’autonomie.

Pour rendre la comparaison tangible, analysons un scénario basé sur un revenu brut annuel de 80 000 CAD en Ontario. Cet exemple chiffré démontre que le statut de salarié, à revenu brut égal, peut souvent résulter en un revenu net effectif supérieur une fois tous les avantages et coûts pris en compte.

Comparaison fiscale salarié vs consultant au Canada (base 80 000 CAD)
Critère Salarié permanent Consultant (incorporé) Différence annuelle
Revenu brut 80 000 CAD 80 000 CAD 0 CAD
Impôts (Ontario) -18 950 CAD -11 500 CAD +7 450 CAD
Assurances collectives Incluses (valeur 5 000 CAD) À payer soi-même -5 000 CAD
Congés payés (4 sem) Inclus (valeur 6 154 CAD) Non payés -6 154 CAD
REER employeur (3%) +2 400 CAD 0 CAD -2 400 CAD
Net effectif annuel 68 604 CAD 62 346 CAD -6 258 CAD

Guide fiscal pour consultants nouveaux arrivants au Canada

  1. Incorporez votre entreprise provinciale ou fédérale (coût : 200-500 CAD) pour bénéficier du taux d’imposition des petites entreprises, comme le précise l’Agence du Revenu du Canada.
  2. Ouvrez un compte TPS/TVH dès que vos revenus dépassent 30 000$ sur 12 mois et facturez la taxe appropriée selon la province du client.
  3. Déduisez une partie de vos frais de logement en tant que bureau à domicile, en calculant le pourcentage de la superficie utilisée exclusivement pour le travail.
  4. Conservez méticuleusement tous les reçus pour les dépenses déductibles : connexion internet, forfait téléphonique, ordinateur, formations professionnelles, etc.
  5. Prévoyez et mettez de côté environ 25-30% de chaque facture pour payer vos acomptes provisionnels d’impôts, généralement dus chaque trimestre.

L’erreur de signer un contrat de travail sans vérifier la clause de non-concurrence

Dans l’enthousiasme de recevoir une première offre d’emploi au Canada, de nombreux nouveaux arrivants commettent une erreur coûteuse : survoler les clauses restrictives du contrat de travail. Parmi elles, la clause de non-concurrence est particulièrement piégeuse. Elle vise à vous empêcher de travailler pour un concurrent ou de lancer votre propre entreprise dans le même secteur pendant une certaine période et dans une zone géographique définie après la fin de votre contrat. Si elle est trop large, elle peut sérieusement handicaper votre évolution de carrière.

L’aspect le plus crucial à comprendre est que la validité et l’application de ces clauses varient énormément d’une province à l’autre. Ce qui est illégal en Ontario peut être parfaitement applicable au Québec. Ignorer cette nuance géographique est une faute stratégique majeure. Votre capacité à changer d’emploi pour une meilleure opportunité peut être directement limitée par ce paragraphe que vous avez signé sans y prêter attention. Il est donc impératif, avant de signer, de comprendre la législation de votre province et de ne pas hésiter à négocier les termes de cette clause.

Analyse comparative : l’impact de la clause de non-concurrence de Toronto à Montréal

Imaginons deux développeuses TI avec des compétences identiques. Celle qui accepte un poste à Toronto bénéficie d’une grande liberté. Depuis la loi de 2021 en Ontario, les clauses de non-concurrence sont interdites pour la plupart des employés, lui permettant de changer d’employeur dans le même secteur sans restriction. En revanche, sa collègue qui signe un contrat à Montréal est dans une situation bien plus délicate. Au Québec, la clause est légale si elle est jugée « raisonnable » par les tribunaux. Un employeur pourrait lui imposer une restriction de ne pas travailler pour un concurrent dans un rayon de 50 km pendant 12 mois. Pour éviter d’être piégé, il est recommandé de négocier pour réduire la durée (ex: 6 mois), limiter le territoire à la ville, et idéalement, transformer la clause en une simple clause de non-sollicitation de clients, qui est bien moins restrictive pour votre carrière. Cette vigilance est une information cruciale que les sites généralistes comme le portail des normes du travail ne détaillent pas toujours avec des exemples concrets.

Quand demander une augmentation : révision annuelle ou après un succès projet ?

Une fois votre premier poste sécurisé, la prochaine étape est la valorisation de votre carrière. La plupart des employés, surtout dans une nouvelle culture de travail, attendent passivement la révision de performance annuelle pour espérer une augmentation. C’est une stratégie sous-optimale. En tant que chasseur de têtes, je vois constamment des talents laisser de l’argent sur la table par manque de proactivité. Le moment le plus propice pour négocier votre salaire n’est pas lors d’un processus administratif standardisé, mais dans la foulée d’un succès tangible que vous venez de livrer.

Avez-vous terminé un projet en avance sur le calendrier ? Votre initiative a-t-elle permis de réduire les coûts ou d’augmenter la satisfaction client ? C’est à ce moment précis que votre valeur pour l’entreprise est la plus visible et la plus facile à quantifier. Attendre 6 ou 10 mois pour la revue annuelle dilue l’impact de cette réussite. La stratégie gagnante consiste à documenter en permanence vos succès et à demander une rencontre formelle avec votre gestionnaire juste après une victoire majeure. Une étude récente de Randstad Canada confirme cette approche : les chances d’obtenir une augmentation significative sont bien plus élevées en dehors du cycle de révision standard, car la discussion est alors basée sur une valeur démontrée et non sur un budget RH annuel.

Discussion professionnelle entre employé et manager dans un bureau moderne canadien

Cette image d’une négociation symbolise l’approche stratégique : vous n’arrivez pas les mains vides, mais avec des preuves concrètes de votre contribution (les graphiques, les chiffres). Selon une étude de Randstad Canada, 73% des augmentations supérieures à 10% sont obtenues dans les 30 jours suivant la conclusion d’un projet majeur, contre seulement 42% lors des revues annuelles. Cela démontre que le timing est un facteur aussi important que la performance elle-même.

La méthode canadienne pour documenter et demander une augmentation

  1. Créez un ‘Brag Document’ : Tenez un fichier personnel où vous listez chaque mois vos réalisations avec des chiffres (ex: « Réduction du temps de traitement de 15% », « Contribution à un projet qui a généré X$ de revenus »).
  2. Consultez les échelles salariales du Guichet-Emplois et les rapports de firmes comme Randstad ou Robert Half pour connaître la valeur marchande de votre poste dans votre région spécifique.
  3. Planifiez une rencontre formelle intitulée « Discussion sur ma contribution et mon évolution de carrière » juste après avoir mené à bien un projet important, sans attendre la revue annuelle.
  4. Préparez une présentation orale de 5 minutes articulée autour de trois points clairs : vos réalisations récentes et quantifiées, votre analyse de la valeur marchande de votre rôle, et votre demande chiffrée.
  5. Formulez votre demande en proposant un chiffre environ 10-15% au-dessus de votre objectif réel pour vous donner une marge de manœuvre lors de la négociation.

Comment savoir si votre ville cible vit d’une industrie saisonnière ?

Le choix de votre première ville d’installation au Canada est une décision stratégique qui aura un impact direct sur la stabilité de votre carrière. Tomber amoureux d’une petite ville pittoresque sans analyser son tissu économique est un piège classique pour les nouveaux arrivants. De nombreuses régions canadiennes, particulièrement celles axées sur le tourisme (comme Banff ou Percé) ou les ressources naturelles, ont une économie fortement saisonnière. Un marché de l’emploi florissant en été peut se transformer en désert d’opportunités dès l’arrivée de l’automne, vous laissant sans revenu pendant des mois.

Votre mission, avant même de commencer à postuler, est de jouer au détective économique. Il ne suffit pas de regarder le taux de chômage global ; vous devez comprendre la structure de l’emploi local. Une ville avec une économie diversifiée, reposant sur plusieurs piliers stables comme l’administration publique, l’éducation (universités, collèges) et la santé (hôpitaux), offrira des opportunités d’emploi toute l’année. Ces secteurs sont largement insensibles aux variations saisonnières et constituent un socle de sécurité pour une première installation.

Analyse économique comparée : le piège de Banff face à la stabilité d’Ottawa

L’analyse des données de Statistique Canada révèle des contrastes frappants. Prenons Banff, en Alberta. Son économie est ultra-dépendante du tourisme, avec une variation d’emploi de 65% entre la haute saison estivale et la basse saison printanière. Le secteur de l’hébergement et de la restauration y représente 48% des emplois. Pour un nouvel arrivant, s’y installer sans un coussin financier conséquent est extrêmement risqué. À l’opposé, la région d’Ottawa-Gatineau affiche une stabilité remarquable. La variation saisonnière de l’emploi n’y est que de 3%. Pourquoi ? Son économie repose sur des piliers solides et non-saisonniers : le secteur gouvernemental fédéral (35% des emplois), la technologie (15%), et le duo santé-éducation (20%). Cette diversification en fait un choix idéal pour une première installation sécurisée, avec des postes permanents disponibles tout au long de l’année.

Tutoriel pour analyser l’économie d’une ville canadienne

  1. Accédez au site de Statistique Canada et recherchez les données de l’Enquête sur la population active (EPA).
  2. Filtrez les données par « Région Métropolitaine de Recensement » (RMR) pour sélectionner la ville ou la région qui vous intéresse.
  3. Examinez les tableaux de données sur l’emploi par industrie (selon le SCIAN), en choisissant une vue mensuelle sur les 12 à 24 derniers mois.
  4. Identifiez les secteurs qui montrent des pics et des creux marqués (une variation de plus de 20% entre le mois le plus haut et le plus bas). Le tourisme, l’agriculture et la construction sont souvent les principaux coupables.
  5. Assurez-vous que la ville dispose d’au moins trois piliers économiques stables et importants (ex: administration publique, soins de santé, services d’enseignement) qui ne fluctuent pas avec les saisons.

Santé ou TI : quel secteur recrute le plus rapidement sans délais administratifs ?

Les secteurs de la santé et des technologies de l’information (TI) sont constamment cités comme étant en forte demande de main-d’œuvre au Canada. Pour un nouvel arrivant, ils semblent être deux voies royales. Cependant, les regarder sous l’angle de la « demande » est trompeur. Le critère le plus important pour vous est la vitesse d’entrée sur le marché. De ce point de vue, ces deux secteurs sont radicalement opposés. Le secteur de la santé est un parcours d’obstacles administratifs, tandis que celui des TI est une autoroute pour qui sait prouver ses compétences.

Pour la quasi-totalité des professions réglementées de la santé (infirmière, médecin, pharmacien), votre diplôme étranger n’a aucune valeur directe. Vous devez passer par un long et coûteux processus d’évaluation et de reconnaissance par un ordre professionnel provincial (ex: OIIQ au Québec, CNO en Ontario). Cela implique des examens, des stages d’équivalence, et des délais qui se comptent en mois, voire en années. En TI, la culture est différente. La « monnaie d’échange » n’est pas le diplôme, mais le portfolio de projets. Un compte GitHub bien fourni, des certifications reconnues internationalement (comme AWS, Azure) ou la réussite d’un test technique en entrevue ont infiniment plus de poids qu’un diplôme, qu’il soit canadien ou non.

Vue macro détaillée d'un stéthoscope médical et d'un circuit électronique symbolisant les deux secteurs

Cette comparaison visuelle d’un stéthoscope et d’un circuit imprimé symbolise la différence fondamentale de parcours. L’un représente un système structuré, réglementé et souvent rigide. L’autre, un écosystème ouvert, basé sur la performance démontrée et la compétence pratique. Selon le rapport 2024 de Robert Half, les développeurs avec un portfolio et des certifications pertinentes trouvent un emploi en moyenne en 21 jours, une rapidité impensable dans le secteur de la santé réglementé.

Le tableau suivant décompose les délais et les coûts associés à l’entrée dans ces deux secteurs, mettant en évidence l’avantage de vitesse spectaculaire du secteur technologique pour un professionnel qualifié arrivant de l’étranger.

Délais d’entrée sur le marché du travail : Santé vs TI au Canada
Critère Santé (infirmière) TI (développeur)
Évaluation diplôme 6-12 mois (ordre professionnel) 0 jour (portfolio GitHub suffit)
Coût reconnaissance 2 000-5 000 CAD 0 CAD (certifications optionnelles)
Examen d’entrée Obligatoire (OIIQ/CNO) Tests techniques en entrevue
Postes non réglementés Préposé bénéficiaire, secrétaire médical Tous les postes TI
Délai premier emploi 3-6 mois après certification 2-4 semaines avec portfolio

À retenir

  • Anticipation saisonnière : Utilisez les périodes creuses (comme l’hiver dans la construction) pour acquérir les certifications locales qui vous rendront indispensable en haute saison.
  • Stratégie du signal : Transformez votre profil LinkedIn d’un CV passif en une plateforme d’expert active pour être « chassé » par les recruteurs plutôt que de postuler.
  • Arbitrage financier : Analysez le « net effectif » (après impôts, avantages sociaux, congés) avant de choisir entre un statut de salarié et de contractuel, le brut étant souvent trompeur.

Comment réussir une entrevue vidéo préenregistrée (asynchrone) sans contact humain ?

Vous avez réussi à attirer l’attention d’un recruteur. Félicitations ! Mais de plus en plus, l’étape suivante n’est pas une conversation, mais un exercice déroutant : l’entrevue vidéo asynchrone. Vous vous retrouvez face à votre webcam, à devoir répondre à des questions qui apparaissent à l’écran, avec un temps limité et sans aucune interaction humaine. Pour beaucoup, l’exercice est intimidant et déshumanisant. Pourtant, c’est une compétence cruciale à maîtriser, car c’est un filtre de plus en plus courant dans les processus de recrutement canadiens.

L’erreur principale est de traiter cet exercice comme un monologue. La clé du succès est de simuler une conversation énergique, même s’il n’y a personne en face. Le recruteur qui visionnera votre vidéo ne jugera pas seulement le contenu de vos réponses, mais aussi votre énergie, votre enthousiasme et votre capacité à communiquer clairement. Le langage non verbal est amplifié : un sourire, un contact visuel direct avec l’objectif de la caméra (et non l’écran), et des gestes naturels sont essentiels. Il faut projeter de la confiance et de la personnalité à travers l’écran. Une analyse de Randstad Canada sur des milliers d’entrevues de ce type est sans appel : les candidats démontrant une énergie élevée et un sourire dans les premières secondes ont une probabilité significativement plus haute de passer à l’étape suivante.

La préparation est donc non-négociable. Vous ne pouvez pas improviser. Structurez vos réponses à l’avance en utilisant la méthode STAR (Situation, Tâche, Action, Résultat), mais ne les apprenez pas par cœur pour ne pas paraître robotique. L’astuce est d’avoir des mots-clés sur des post-it placés autour de votre écran pour vous guider, tout en gardant une conversation fluide et naturelle.

Guide de préparation pour entrevue vidéo asynchrone

  1. Préparez 5-6 exemples de réalisations passées en utilisant la méthode STAR (Situation-Tâche-Action-Résultat). Chaque histoire doit pouvoir être racontée en moins de 2 minutes.
  2. Créez un « mur de post-it » discret derrière votre ordinateur (hors champ de la caméra) avec des mots-clés : vos projets chiffrés, les valeurs de l’entreprise, vos compétences clés.
  3. Faites au moins trois répétitions complètes en vous enregistrant avec votre téléphone. Analysez votre langage corporel, votre débit, et surtout, forcez-vous à sourire et à regarder l’objectif.
  4. Assurez-vous que votre arrière-plan est neutre et professionnel, que l’éclairage vient de face (pas de contre-jour) et que votre connexion internet est stable.
  5. Terminez chaque réponse vidéo par une phrase positive et tournée vers l’avenir, montrant votre enthousiasme spécifique pour le rôle et l’entreprise canadienne en question.

Pour transformer cet exercice intimidant en une occasion de briller, il est vital de s’approprier une méthode de préparation et d'exécution rigoureuse.

Maintenant que vous comprenez les stratégies pour contourner les obstacles et valoriser votre profil, l’étape suivante consiste à passer de la connaissance à l’action. Mettez en œuvre ces tactiques de manière ciblée pour transformer votre recherche d’emploi en une véritable campagne de marketing personnel.

Rédigé par Sarah Jenkins, Conseillère en Ressources Humaines Agréée (CRHA) et coach de carrière, Sarah dispose de 10 ans d'expérience en acquisition de talents et gestion de la diversité. Elle est experte dans l'adaptation des profils internationaux aux exigences du marché du travail canadien.