
Votre première déclaration d’impôts au Canada est bien plus qu’une obligation administrative : c’est l’acte fondateur de votre vie financière dans le pays.
- Elle établit votre crédibilité auprès des banques en générant un Avis de Cotisation, essentiel pour obtenir prêts et cartes de crédit.
- Elle vous donne accès à des crédits et prestations même si vous n’avez aucun impôt à payer.
- Elle vous oblige à comprendre des mécanismes clés comme le REER et le CELI pour optimiser votre avenir financier.
Recommandation : Abordez cette démarche non comme une corvée, mais comme votre premier investissement stratégique pour réussir votre intégration économique au Canada.
Bienvenue au Canada ! Entre l’excitation de l’installation et la découverte d’une nouvelle culture, un document officiel finit toujours par attirer votre attention : la déclaration de revenus. Pour un nouvel arrivant, ce processus peut sembler intimidant, voire complexe, surtout si vous venez d’un pays où le prélèvement à la source dispense de cette formalité annuelle. Vous avez sans doute déjà entendu parler de la date butoir du 30 avril, des logiciels spécialisés ou de l’importance de rassembler vos feuillets de renseignements.
Cependant, se focaliser uniquement sur ces aspects techniques, c’est passer à côté de l’essentiel. Et si la véritable valeur de cette première déclaration n’était pas de simplement se conformer à une obligation, mais de poser activement les fondations de votre avenir financier canadien ? Si cette démarche était en réalité la clé qui vous ouvre les portes du crédit, sécurise vos projets personnels et vous protège contre des erreurs de débutant coûteuses, spécifiques aux nouveaux résidents ? C’est une opportunité de prendre le contrôle de votre situation fiscale dès le départ.
Cet article n’est pas un simple mode d’emploi. Nous allons décortiquer ensemble comment transformer cette obligation en un puissant levier stratégique. Nous verrons pourquoi déclarer est crucial même sans revenu canadien, comment naviguer entre les mythes et réalités des déductions, et surtout, comment cette première déclaration devient le geste fondateur pour bâtir votre crédibilité financière au Canada.
Pour vous guider à travers les spécificités de ce processus, voici une feuille de route détaillée des points essentiels que nous allons aborder. Chaque section est conçue pour répondre à une question précise et vous armer des connaissances nécessaires pour une première déclaration sereine et optimisée.
Sommaire : Votre guide pour une première déclaration de revenus réussie au Canada
- Pourquoi devez-vous déclarer vos revenus mondiaux même si vous n’avez pas travaillé au Canada ?
- Comment déduire vos frais de déménagement pour réduire votre impôt la première année ?
- TurboImpôt ou expert-comptable : quelle solution pour une situation simple ?
- L’erreur d’envoyer sa déclaration après le 30 avril si vous devez de l’argent
- Quand cotiser à vos REER pour faire baisser votre tranche d’imposition ?
- Comment payer moins d’impôts en choisissant stratégiquement sa province de résidence au 31 décembre ?
- CELI ou REER : quel régime d’épargne privilégier pour des projets à court terme ?
- Comment bâtir un historique de crédit solide au Canada en moins de 12 mois ?
Pourquoi devez-vous déclarer vos revenus mondiaux même si vous n’avez pas travaillé au Canada ?
C’est l’une des plus grandes surprises pour de nombreux nouveaux arrivants : l’obligation de déclarer ses revenus ne commence pas avec votre premier emploi au Canada, mais avec votre statut de résidence fiscale. En règle générale, vous êtes considéré comme résident fiscal canadien si vous avez séjourné dans le pays pendant 183 jours ou plus au cours d’une année civile. À partir de la date où vous êtes devenu résident, l’Agence du revenu du Canada (ARC) attend de vous que vous déclariez tous vos revenus, peu importe leur provenance dans le monde. Cela inclut les revenus de location d’un bien à l’étranger, les revenus de placements ou même un salaire perçu dans votre pays d’origine après votre arrivée au Canada.
Cette règle peut sembler punitive, mais elle est conçue pour éviter que les résidents ne dissimulent des revenus gagnés hors du pays. Heureusement, le Canada a signé des conventions fiscales avec de nombreux pays pour éviter la double imposition. Cela signifie que vous n’aurez généralement pas à payer deux fois l’impôt sur le même revenu. Vous pouvez demander un crédit pour impôt étranger sur votre déclaration canadienne pour l’impôt que vous avez déjà payé dans un autre pays. Il est donc crucial de conserver toutes les preuves de l’impôt payé à l’étranger.
Déclarer vos revenus, même minimes ou nuls, est également la porte d’entrée à plusieurs crédits et prestations. C’est en produisant une déclaration que vous vous rendez admissible au crédit pour la TPS/TVH ou à l’Allocation canadienne pour enfants, des sommes versées par le gouvernement qui peuvent représenter une aide financière non négligeable lors de votre première année.
Comment déduire vos frais de déménagement pour réduire votre impôt la première année ?
Voilà un sujet qui prête souvent à confusion et qui constitue un piège classique pour les nouveaux arrivants. L’idée de déduire les coûts importants liés à un déménagement international est séduisante, mais la réalité fiscale canadienne est très stricte à ce sujet. Contrairement à une idée répandue, les frais engagés pour déménager vers le Canada depuis un autre pays ne sont généralement pas déductibles de vos impôts.
La déduction pour frais de déménagement est principalement conçue pour les personnes qui déménagent à l’intérieur du Canada pour se rapprocher d’un nouvel emploi, d’une entreprise ou pour poursuivre des études postsecondaires. La règle exige un rapprochement d’au moins 40 kilomètres. Un immigrant qui arrive au pays ne remplit pas cette condition initiale. Cependant, il existe une exception très spécifique : selon une analyse de la fiscalité applicable aux nouveaux arrivants, un étudiant qui reçoit une subvention de recherche pour fréquenter un établissement d’enseignement postsecondaire canadien pourrait être admissible à déduire certains frais.
Ne pas pouvoir déduire ces frais est souvent une déception, mais il est préférable de le savoir à l’avance plutôt que de faire une demande de déduction incorrecte qui pourrait être refusée par l’ARC, entraînant des ajustements et des pénalités potentielles. Concentrez-vous plutôt sur les nombreux autres crédits auxquels vous avez droit en tant que nouvel arrivant, comme le montant personnel de base, le crédit canadien pour aidant naturel ou les frais médicaux.
TurboImpôt ou expert-comptable : quelle solution pour une situation simple ?
Une fois vos documents rassemblés, la grande question se pose : comment allez-vous préparer et transmettre votre déclaration ? Deux voies principales s’offrent à vous : utiliser un logiciel d’impôt homologué par l’ARC, comme TurboImpôt ou Wealthsimple Tax, ou faire appel à un professionnel, tel qu’un expert-comptable ou un préparateur d’impôts.
Pour une situation simple, les logiciels sont une excellente option. Une situation est considérée comme simple si vous êtes un salarié avec un ou plusieurs feuillets T4, sans revenus de travail indépendant, sans placements complexes et sans revenus locatifs. Ces plateformes sont conçues pour être intuitives, posant des questions claires pour vous guider pas à pas. Elles sont souvent gratuites ou peu coûteuses et vous permettent de transmettre votre déclaration en ligne via le service IMPÔTNET. C’est une manière économique et efficace de prendre en main votre fiscalité, surtout si vous êtes à l’aise avec les outils numériques.
En revanche, faire appel à un expert-comptable devient judicieux dès que votre situation se complexifie. Si vous avez des revenus de plusieurs pays, des revenus de travailleur autonome, des biens locatifs, ou si vous n’êtes tout simplement pas sûr de bien comprendre toutes les subtilités, l’investissement en vaut la peine. Un professionnel s’assurera que vous ne manquez aucun crédit ou déduction applicable, optimisera votre déclaration et vous apportera une tranquillité d’esprit inestimable. Pour une première déclaration, cet accompagnement peut être particulièrement rassurant.

Le choix dépend donc de votre niveau de confort et de la complexité de votre profil financier. Ne sous-estimez pas la valeur de la tranquillité d’esprit lors de cette première expérience. Il est parfois plus sage de payer pour un service professionnel la première année pour bien comprendre les bases, puis de prendre le relais avec un logiciel les années suivantes.
L’erreur d’envoyer sa déclaration après le 30 avril si vous devez de l’argent
La date limite pour la production de la déclaration de revenus est gravée dans l’esprit de tous les Canadiens : le 30 avril (ou le 15 juin si vous ou votre conjoint êtes travailleur autonome, bien que le paiement reste dû pour le 30 avril). Ce qui est moins connu, c’est la conséquence exacte d’un retard. L’erreur la plus coûteuse est de ne pas produire sa déclaration à temps lorsque vous avez un solde d’impôt à payer.
Si vous devez de l’argent à l’ARC et que vous produisez votre déclaration en retard, une pénalité s’applique immédiatement. Cette pénalité est sévère : elle correspond à 5% du solde dû, plus 1% additionnel pour chaque mois complet de retard, jusqu’à un maximum de 12 mois. Ces frais peuvent rapidement faire grimper une petite dette fiscale. Par contre, si l’ARC vous doit un remboursement ou si votre solde est de zéro, il n’y a aucune pénalité pour production tardive, bien que vous retardiez la réception de votre argent et l’accès à certains crédits.
Le conseil le plus important est donc le suivant : même si vous savez que vous ne pourrez pas payer votre solde d’impôt avant le 30 avril, produisez quand même votre déclaration à temps. En faisant cela, vous évitez la pénalité pour production tardive. Vous devrez toujours payer des intérêts sur le montant dû, mais ceux-ci sont généralement moins élevés que la pénalité. Une fois votre déclaration produite, vous pouvez contacter l’ARC pour négocier une entente de paiement adaptée à votre situation financière.
Plan d’action pour respecter les délais et éviter les pénalités
- Anticipation : Dès le mois de janvier, marquez le 30 avril dans votre calendrier comme une date non négociable.
- Collecte des documents : Visez à rassembler tous vos feuillets T4, relevés de placements et reçus de dépenses déductibles avant la mi-mars pour ne pas travailler dans l’urgence.
- Priorité à la production : Si vous anticipez un solde à payer, produisez votre déclaration avant la date limite, même si vous ne pouvez pas payer la totalité immédiatement.
- Communication avec l’ARC : Après avoir produit votre déclaration, si vous ne pouvez payer, contactez proactivement l’ARC pour discuter d’une entente de paiement et démontrer votre bonne foi.
- Optimisation des remboursements : Inscrivez-vous au dépôt direct auprès de l’ARC. Si vous attendez un remboursement, vous le recevrez généralement en moins de deux semaines, contre plusieurs semaines par la poste.
Quand cotiser à vos REER pour faire baisser votre tranche d’imposition ?
Le Régime enregistré d’épargne-retraite (REER) est l’un des outils de planification fiscale les plus puissants au Canada. Le principe est simple : les sommes que vous y cotisez sont déductibles de votre revenu imposable, ce qui peut faire baisser votre impôt à payer. Cependant, pour un nouvel arrivant, il y a un piège majeur à éviter durant la première année.
Vos droits de cotisation REER ne sont pas illimités. Ils sont calculés sur la base de 18 % de votre revenu gagné de l’année précédente, jusqu’à un plafond annuel. Or, lors de votre première année au Canada, vous n’aviez aucun revenu gagné déclaré au Canada l’année précédente. Par conséquent, sauf rares exceptions, vous n’avez aucun droit de cotisation REER pour votre première année fiscale. Comme le souligne une analyse sur les particularités fiscales des immigrants, cotiser sans droits entraîne une pénalité de 1 % par mois sur le montant excédentaire.
La stratégie consiste donc à attendre. C’est le revenu que vous déclarez pour votre première année au Canada qui générera vos premiers droits de cotisation pour l’année suivante. Vous pourrez alors commencer à utiliser le REER comme un levier fiscal. Pour optimiser votre déclaration de la deuxième année, sachez que vous pouvez cotiser à votre REER pendant les 60 premiers jours de l’année suivante et déduire cette cotisation de vos revenus de l’année qui vient de se terminer. Par exemple, une cotisation faite en février 2025 peut réduire votre impôt à payer pour l’année 2024. C’est un outil de planification très flexible.
Comment payer moins d’impôts en choisissant stratégiquement sa province de résidence au 31 décembre ?
Au Canada, votre impôt sur le revenu se compose de deux parties : l’impôt fédéral, qui est le même pour tous, et l’impôt provincial ou territorial, qui varie considérablement d’une province à l’autre. La règle qui détermine quel taux provincial s’applique à vous est simple mais lourde de conséquences : c’est votre province de résidence au 31 décembre de l’année d’imposition qui compte.
Cela signifie que même si vous avez vécu 11 mois en Ontario, une province au fardeau fiscal modéré, et que vous déménagez au Québec, connu pour sa fiscalité plus élevée, le 30 décembre, c’est le taux québécois qui s’appliquera à l’ensemble de vos revenus de l’année. L’impact financier peut être significatif. Pour les nouveaux arrivants qui ont une certaine flexibilité sur leur date d’établissement dans leur province de destination, cette information peut être stratégique.
Le tableau suivant illustre les différences notables de taux marginaux et d’impôt total estimé pour un revenu annuel de 60 000 $, en se basant sur une analyse comparative récente. Il met en lumière l’importance de ce choix géographique.
| Province | Taux marginal | Impôt total estimé | Particularités |
|---|---|---|---|
| Alberta | 30.5% | ~11 000 $ | Pas de taxe de vente provinciale |
| Ontario | 29.65% | ~11 800 $ | Crédit Trillium disponible |
| Québec | 37.12% | ~14 500 $ | Double déclaration requise |
| Colombie-Britannique | 28.2% | ~11 200 $ | Climat fiscal modéré |
Le cas du Québec est particulièrement distinct, comme le précise un guide de Wealthsimple. Cette province a son propre ministère du Revenu, ce qui implique une complexité administrative supplémentaire.
Les résident.es du Québec doivent produire deux déclarations, une pour Revenu Québec et l’autre pour l’ARC. Ailleurs au Canada, une seule déclaration suffit pour les personnes physiques.
– Wealthsimple, Guide pratique des impôts au Canada
Bien que la décision de s’installer dans une province dépende de nombreux facteurs (emploi, famille, coût de la vie), connaître l’impact fiscal de votre date de déménagement est un atout non négligeable dans votre planification.
CELI ou REER : quel régime d’épargne privilégier pour des projets à court terme ?
En tant que nouvel arrivant, la constitution d’un fonds d’urgence et l’épargne pour des projets à court ou moyen terme (comme l’achat d’une voiture ou une mise de fonds pour un logement) sont des priorités. Si le REER est excellent pour la retraite, le Compte d’épargne libre d’impôt (CELI) est souvent l’outil le plus adapté et le plus flexible pour vos premières années au Canada.
Le principal avantage du CELI est sa souplesse. Contrairement au REER, les retraits d’un CELI ne sont pas imposables. Vous pouvez retirer de l’argent à tout moment, pour n’importe quelle raison, sans impact fiscal. De plus, les droits de cotisation que vous avez utilisés lors d’un retrait sont reconstitués dès le début de l’année civile suivante. Cela en fait le véhicule idéal pour un fonds d’urgence. Vous avez le droit de cotiser au CELI dès l’année de votre arrivée si vous avez 18 ans ou plus et possédez un numéro d’assurance sociale (NAS) valide. Chaque année, le gouvernement fixe un plafond de cotisation (par exemple, 7 000 $ pour 2024).

N’oubliez pas que le simple fait de produire votre déclaration de revenus vous rend éligible à des prestations, ce qui renforce l’importance de cette démarche. Par exemple, selon les critères de l’ARC, les célibataires admissibles peuvent recevoir jusqu’à 533 $ par année au titre du crédit pour la TPS/TVH, une somme versée automatiquement aux ménages à faible et moyen revenu.
Pour ouvrir votre premier CELI, les étapes sont simples :
- Obtenez votre numéro d’assurance sociale (NAS) dès votre arrivée.
- Ouvrez un compte dans une institution financière canadienne.
- Vérifiez vos droits de cotisation sur le site de l’ARC une fois votre première déclaration traitée.
- Ouvrez un compte CELI et commencez à y placer votre épargne de précaution.
- Soyez vigilant à ne pas surcotiser, car cela entraîne une pénalité de 1 % par mois sur l’excédent.
À retenir
- Votre première déclaration est un outil stratégique : elle génère votre Avis de Cotisation, la clé de votre crédibilité financière au Canada.
- Attention aux pièges courants : les frais de déménagement depuis l’étranger ne sont généralement pas déductibles et vous n’avez pas de droits de cotisation REER la première année.
- Privilégiez le CELI pour votre épargne à court terme : sa flexibilité et ses retraits non imposables en font l’outil parfait pour un fonds d’urgence.
Comment bâtir un historique de crédit solide au Canada en moins de 12 mois ?
C’est peut-être le bénéfice le plus tangible et le plus important de votre première déclaration d’impôts, et celui qui illustre le mieux son rôle de « geste fondateur ». Au Canada, sans historique de crédit, vous êtes pratiquement invisible pour les institutions financières. Obtenir une carte de crédit non garantie, un prêt automobile, ou même signer un bail pour un appartement peut devenir un parcours du combattant. Votre bon historique financier de votre pays d’origine ne compte malheureusement pas ici.
Alors, comment construire cette confiance à partir de zéro ? Votre première déclaration de revenus est le catalyseur. Une fois que vous l’avez produite et qu’elle a été traitée par l’ARC, vous recevrez un document crucial : l’Avis de Cotisation. Ce document officiel est la preuve de revenu la plus crédible qui soit au Canada. Il atteste de vos revenus déclarés et validés par le gouvernement.

Armé de cet Avis de Cotisation, vous pouvez vous présenter dans une banque avec une confiance renouvelée. Comme le met en lumière une analyse de la Banque Scotia, ce document facilite grandement l’obtention de produits de crédit. Il démontre votre stabilité et votre intégration au système canadien. Combiné à une carte de crédit garantie (où vous déposez une caution) ou à un forfait téléphonique, que vous payez systématiquement à temps, votre cote de crédit commencera à se bâtir. En moins de 12 mois, en utilisant ces outils de manière responsable, vous pouvez établir un historique de crédit solide qui vous ouvrira les portes de projets plus ambitieux.
Considérez votre première déclaration non pas comme une contrainte, mais comme votre premier acte stratégique pour construire un avenir financier solide au Canada. Prenez le temps de bien la préparer ; c’est un investissement qui portera ses fruits bien au-delà du simple remboursement d’impôt ou du paiement d’un solde dû.